Parler sans complexe de démographie

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29 octobre 2019
« Un problème, une solution ! » Il serait si simple d’aborder les dossiers clivants selon cet adage. Mais il n’en est rien, car rien que l’évocation de la Convention, de l’accès aux soins, des dépenses de santé, ou encore de la réforme des retraites, n’entraîne pas une, mais de multiples réponses. Il en va de même pour la démographie professionnelle.

HammerLes pouvoirs publics parlent sans relâche de déserts médicaux, de zones sous-denses ou de territoires « particulièrement sur-dotés ». Cela engendre une prise de parole sans réserve de la Cour des comptes et même dernièrement de la Direction générale du Trésor, qui consacre son bulletin d’octobre à ce sujet. À tout cela s’ajoutent les parlementaires qui, chaque année, proposent des amendements pour actionner différents leviers de contrôle sur l’installation des professionnels de santé. Et enfin, à l’échelon local, la démographie est étudiée par chaque élu en fonction de son canton et de sa ville, tandis que les praticiens développent leur vision en fonction de leur cabinet et de leur fonctionnement. Résultat, à défaut de réelles solutions, s’ensuivent des raccourcis aussi nombreux que de situations sur le terrain.

Parler de démographie en pensant que la réponse est unique est donc une erreur. Face à la complexité du problème, plusieurs hypothèses doivent être envisagées pour que l’issue soit la meilleure dans le respect de différents principes.

Parler de démographie en pensant que la réponse est unique est donc une erreur.

L’incitation est un de ces principes et doit le rester. Inciter au déploiement de notre activité dans les territoires où le besoin de soins est prégnant est indispensable. C’est ce qui a été entrepris avec les CESP durant les études et avec les mesures conventionnelles en faveur de l’installation et du maintien des praticiens dans les zones en sous-densité médicale. Mais, pour une efficacité améliorée, nous demandons une révision du zonage, qui doit être le plus proche de la réalité du terrain ainsi que son actualisation périodique.

La régulation est une autre piste de réflexion dont on ne peut s’exonérer. Bercy parle « d’une adaptation temporaire et ciblée du principe de libre installation », la Cour des comptes aborde le « conventionnement sélectif ».

Pour Les CDF, la liberté d’installation reste un principe libéral fondamental, une ligne rouge à ne pas franchir. Mais force est de constater qu’il arrive un moment où les effets pervers mettent en danger le système et qu’une dose de régulation s’impose, surtout dans les zones surdotées. C’est pourquoi ce dossier fait l’objet de débats au sein de la Confédération, avec pour conclusion qu’il n’est pas incompatible, pour sauver l’exercice libéral, de parler dans le même temps de liberté et de régulation. Mais celle-ci ne doit pas concerner seulement nos cabinets, mais aussi, et de façon simultanée, les centres de santé, qui ne cessent de se multiplier.

Parler démographie, c’est aussi parler Europe et des flux migratoires des praticiens diplômés. D’autant plus que la réforme de la PACES ainsi que la création de passerelles vont rapidement et totalement bouleverser la donne.

La démographie professionnelle est donc bien un enjeu crucial qui est aujourd’hui acté dans la Convention. En la signant, Les CDF ont démontré leur lucidité sur ce sujet vital pour l’avenir de l’exercice libéral, mais aussi clivant et complexe à traiter. Encore une fois, cette signature prouve notre volonté d’être acteur de notre avenir plutôt que de laisser les mains libres à l’Administration, et se voir imposer des mesures autrement plus coercitives.

Doniphan HAMMER 1er vice-président