L’Assemblée nationale à l’écoute

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25 novembre 2022
Création du métier d’assistant dentaire de niveau 2, encadrement des centres dentaires, les députés écoutent les organisations syndicales pour affiner leurs propositions de loi. Par deux fois dans la même semaine, deux délégations des CDF ont exposé leurs arguments pour que les futures lois répondent aux exigences de ceux qui sont en première ligne.

Cela bouge à l’Assemblée nationale ! Deux propositions de loi ont été déposées, qui ne sont pas sans influence sur la profession dentaire. La première sur l’accès aux soins prévoit dans son article 4, la création de la profession d’assistant en médecine bucco-dentaire (ADQ2). Elle est portée par les députés Stéphanie Rist (Loiret, REN) et Aurore Bergé (Yvelines, REN). La seconde, à l’initiative de Fadila Khattabi, députée Renaissance de la Côte d’Or et présidente de la commission des affaires sociales, vise à améliorer l’encadrement des centres de santé. Deux délégations des CDF ont été invitées à faire connaître leur expertise, lors des travaux préparatoires de ces propositions de loi soutenues par le groupe Renaissance et apparentés. 

Un projet mûri pendant 6 ans

Ainsi, le 8 novembre, Lisiane Hervet, secrétaire générale adjointe et Marie Tourterel, vice-présidente, ont été auditionnées à l’Assemblée nationale par Stéphanie Rist entourée des députés Joëlle Melin (Bouches-du-Rhône, RN) et Jérôme Guedj (Essonne, PS). Étaient également présents à cette rencontre formelle, Émilie Vergonjanne et Damien Gilles pour l’UNECD, ainsi qu’une représentante de la FSDL. Après un long travail de construction de ce dossier avec les partenaires sociaux de la « branche dentaire », et l’ensemble des ministères de tutelle, les CDF se félicitent de voir aboutir cette proposition de loi qui crée la profession « d’assistant en médecine bucco-dentaire ».

Le principe défendu est que chaque chirurgien-dentiste n’ait sous sa responsabilité qu’un seul ADQ2 

La délégation CDF a présenté le projet qu’elle défend depuis plus de 6 ans : la nécessité d'un exercice de l’assistant dentaire de niveau 2 (ADQ2) sous la responsabilité et le contrôle effectif du praticien, mais aussi le danger de la multiplication de ces assistants dans les centres dentaires. Point sur lequel les députés, pleinement conscients des dérives et risques existants, ont été très sensibles. Les CDF leur ont donc proposé que l’emploi d’un ADQ2 ne s’effectue que sous le contrôle du praticien référent d’un centre dentaire, qui sera, selon les dispositions de la PPL Khattabi, responsable de la qualité́ et de la sécurité́ des soins ainsi que des actes professionnels devant l’ARS. Il a été défendu le principe que chaque chirurgien-dentiste (libéral ou praticien référent de centre dentaire) n’ait sous sa responsabilité qu’un seul ADQ2.

Un espoir pour la rentrée

Poursuivant la discussion, les CDF ont fait part de leur inquiétude sur la proposition de Stéphanie Rist de créer le métier d'assistant(e) de prévention libérale. Marie Tourterel et Lisiane Hervet ont ainsi rappelé que de l’avis même des représentants syndicaux des assistants dentaires, ce n’est pas une forme d’exercice à laquelle ils aspirent et qu’en Europe, très peu d’hygiénistes exercent en libéral. Par ailleurs, ce projet de loi inclut d’autres dispositions qui concernent les kinésithérapeutes, les infirmières et les orthophonistes. Mais Stéphanie Rist a précisé que les divers articles ne formaient pas un « package » et que celui concernant l’ADQ2 pourra être adopté même si les autres étaient rejetés. Les députés ont été agréablement surpris par la cohésion de la profession et par ce projet, depuis longtemps travaillé, qui présente toutes les facettes de ce nouveau métier. Les CDF espèrent donc que cette proposition de loi, présentée en janvier 2023, donnera enfin naissance à l’ADQ2.

Des centres de santé encadrés

Le 10 novembre, c’était au tour de Pierre-Olivier Donnat, président confédéral, entouré de Catherine Mojaïsky, conseillère spéciale, et d’Alain Vallory, secrétaire général, d’être entendu par les députés Fadila Khattabi, Thibault Bazin (Meurthe-et-Moselle, LR) et Claire Guichard (Hauts-de-Seine, REN) sur la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé. Elle sera examinée par l’Assemblée nationale fin novembre, après un passage en commission des affaires sociales le 25. La FSDL et le SFCD étaient également présents pour cette consultation réalisée par visioconférence. Lors de son propos liminaire, Fadila Khattabi a rappelé son expérience de la déviance des centres dentaires en tant qu’élue de la circonscription où sévissait Proxidentaire, ainsi que ses rencontres avec l'association des victimes de celui-ci et de Dentexia, autre centre dentaire de sinistre mémoire. Plusieurs propositions d’amendements ont été portées lors de cette audition. Un premier vise à identifier clairement les praticiens exerçant dans les centres dentaires pour que tous les actes réalisés soient traçables par l’Assurance maladie. Le but étant de pouvoir identifier l’activité, parfois totalement hors normes, de chaque chirurgien-dentiste salarié, indépendamment de la structure. Il est également apparu à la commission des affaires sociales la nécessité d’une protection en tant que « lanceur d’alerte » du praticien référent légalement responsable des éventuels abus ou défaillances qui pourraient survenir dans un centre dentaire, afin qu’il puisse avoir toute liberté de signalement vis-à-vis de son employeur. Les pouvoirs de contrôle du Conseil de l’Ordre, ainsi que les défauts de transmission des contrats de travail qui empêchent toute vérification de l’inscription au tableau des praticiens recrutés et le suivi des effectifs ont également été évoqués. Pour la profession, les CDO devraient être directement associés à l’agrément donné pour l’ouverture d’un centre dentaire. En l’absence de divergence de fond, l’ensemble de ces points n’a pas engendré de débat.

Vision stratégique de l’offre de soins

Le président confédéral a également rappelé que les centres dentaires dévoient les objectifs que leur a fixés la loi HPST de 2009. Alors que leur mission initiale était de répondre aux besoins de soins dans les zones les moins bien dotées, les centres s’installent dans et autour des grands centres urbains avec un objectif de rentabilité financière. De plus, l’offre de salariat que ces centres générent, et dont sont friands les jeunes consoeurs et confrères, capte une très large partie des ressources humaines de la profession, ce qui accentue d’autant le problème des zones en tension démographique. Il a donc réitéré la demande des CDF visant à permettre aux praticiens libéraux de s’adjoindre autant de collaborateurs (salariés ou libéraux) que leur plateau technique peut en accueillir. Pierre-Olivier Donnat a réaffirmé que les cabinets libéraux sont les seuls à pouvoir assurer un maillage territorial cohérent en regard des besoins et de la demande de soins. Cette dernière disposition a été approuvée par Fadila Khattabi. Malheureusement, elle ne pourra trouver sa place dans la PPL présentée, mais la députée lui a assuré qu’elle la soutiendra dans le cadre d’un autre dispositif législatif. Pour compléter cette vision stratégique sur l’offre de soins, le président de la FSDL a expliqué aux parlementaires que « grâce à la Convention et au 100 % santé, les problèmes d’accès aux soins pour des raisons financières étaient dorénavant réglés » (Sic !). Ainsi, pour la FSDL, la Convention est porteuse d’une avancée majeure en la matière qui enlève toute raison d’être à ces centres associatifs.

Réflexions et avenir

La séance s’est achevée sur deux observations. La première a été formulée par la députée Claire Guichard qui, citant ses propres difficultés dans sa ville d'Issy-les-Moulineaux, a souhaité que les maires soient davantage impliqués dans les installations des centres dans leur commune et aient davantage leur mot à dire, notamment dans la procédure d’agrément. Enfin, Catherine Mojaïsky a insisté sur les efforts récents de l’Assurance maladie avec des contrôles d’activités visant les centres dentaires qui présentent des indicateurs d’alerte. C’est en effet un acteur majeur dans les procédures de suivi et de surveillance.