Le 9 juin dernier s’est déroulée la troisième séance plénière des négociations conventionnelles… Cette « drôle de négo » comme s’en étonnait le président des CDF, Pierre-Olivier Donnat, dans un éditorial début juin, apparaît toujours être le lieu des mots et de la communication mais certes pas encore celui des propositions chiffrées de l’Assurance maladie. Celle-ci a bien dévoilé son intention d’une génération sans prothèse en valorisant certains actes de prévention pour la cohorte 3 - 24 ans, mais quid des soins pour les autres patients c’est-à-dire tous ceux qui ont plus de 24 ans aujourd’hui, quid des revalorisations des paniers ou encore des urgences ? Selon les CDF : rien de concret aujourd’hui pour accompagner l’exercice des chirurgiens-dentistes en période d’inflation et accroître l’accès de tous les Français à la médecine bucco-dentaire !
Enfin un zonage
Alors que les médias bruissaient de l’annonce d’un amendement porté par plus de 200 députés pour instaurer une régulation de l’installation de médecins ou de chirurgiens-dentistes, l’Uncam a révélé un nouveau zonage classant tout le territoire en 5 types : de territoires de vie santé (TVS) « très sous-dotés » à des TVS « sur-dotés » ou « non prioritaires ». Elle répondait ainsi à une demande de longue date des CDF puisque le dernier zonage qui datait de 2012 était totalement obsolète. Cette nouvelle cartographie classe chaque territoire en fonction de la population et de ses caractéristiques telles que l’âge, la prévalence de certaines ALD, le taux de C2S, mais aussi de l’activité des chirurgiens-dentistes. Cette nouvelle méthodologie fait ainsi « basculer » près de 30 % de la population française en zones très sous-dotées.
Pour les CDF, la première des réponses possibles à la lutte contre les déserts médicaux est d’étendre l’aide à l’installation de 50 000 euros et l’aide au maintien de l’activité (forfait de 4 000 €/an pendant 3 ans renouvelables), prévues pour les zones « très sous-dotées (30 %) », à celles classées comme « sous-dotées » (15 % supplémentaires), ou à rendre éligible à ces aides la totalité d’un département lorsqu’il n’est pourvu que de zones « très sous-dotées » ou « sous-dotées ». L’objectif est d’éviter un maillage si fin, qu’au final il en perdrait toute efficacité et rebute les nouveaux confrères à s’installer en raison de chicaneries administratives pour obtenir une aide !
Mais inciter à s’installer ne suffit plus, il est indispensable de redonner de l’attractivité à l’exercice libéral dans tous les territoires, en instituant par exemple des indemnités journalières pour les praticiennes afin de couvrir les charges fixes de leur cabinet pendant leur congé maternité, ou encore une prise en charge par l’Assurance maladie, à l’instar des médecins, des cotisations dites « d’allocations familiales » des praticiens.
Pas de monopole pour les centres
En revanche, les CDF s’opposent vivement à l’idée d’un remplacement de 1 pour 1 dans les zones sur-dotées désormais désignées comme « non prioritaires ». Ce dispositif qui prévoit que le conventionnement ne peut être accordé à un chirurgien-dentiste dans une « zone non prioritaire » que si un autre chirurgien-dentiste a préalablement mis fin à son activité conventionnée dans cette même zone, équivaudrait à créer un monopole de fait au bénéfice des centres de santé déjà présents dans ces territoires.
Débarrassés de toute nouvelle concurrence, ils multiplieront le nombre de leurs fauteuils et de leurs praticiens salariés que l’Assurance maladie est dans l’incapacité de dénombrer du fait de l’opacité de fonctionnement de ces centres ! Le temps où le discours gouvernemental avait comme leitmotiv, « le centre dentaire est solution pour les zones sous-dotées » s’est depuis longtemps fracassé sur la réalité comptable de leur recherche de profits dans les zones urbaines. Pour les CDF, il est donc totalement exclu de leur offrir une opportunité de développement, d’autant que les centres agissent déjà, de fait, comme des pompes aspirantes des nouveaux diplômés.
Prise en charge de l’urgence
L’équipe des négociateurs des CDF a également fait part de ses propositions pour l’amélioration de la permanence des soins (PDS). Il s’agit avant tout d’identifier les actes d’urgence non existants à la CCAM ou non pris en charge et de les valoriser à la hauteur des enjeux de la PDS. De plus, les CDF préconisent l’instauration d’une rémunération forfaitaire, correspondant au coût horaire moyen d’un cabinet dentaire pour la réservation d’une plage horaire dédiée aux urgences.
Course contre-la-montre
D’autres réunions sont encore prévues mais le temps file et le tic-tac de l’échéance du 24 juillet resonne de plus en plus fort. Or, les attentes restent importantes sur les revalorisations, tant pour les prothèses, notamment amovibles et leurs réparations, que pour les soins conservateurs, endodontiques et chirurgicaux. Il ne faudrait pas que, de « drôle », cette négociation voulue par la FSDL fasse « pschit » ! Conscients de l’enjeu et du risque de règlement arbitral, les CDF continueront à proposer et à tracer les voies d’améliorations de l’exercice quotidien, espérant convaincre, pour obtenir un résultat aussi significatif que ceux de la convention de 2018, pour l’accès aux soins des patients et le changement de paradigme de la santé orale.